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Keygen Music : chiptune et piratage dans les années 80

Qui n’a jamais fait une seule fois l’usage d’un keygen (générateur de clé) ou crack pour contourner les protections d’un logiciel ou jeu vidéo afin de l’utiliser gratuitement ? Si c’est le cas, alors vous avez déjà sûrement fait l’expérience des fameuses introductions musicales incluses dans ces petits outils maléfiques et illégaux : des animations accompagnées d’une mélodie sommaire mais souvent très entêtante. Si elle tombe maintenant en désuétude, la « keygen music » tire ses racines d’une sous-culture à la croisée entre le piratage et l’art numérique. 

La pratique du piratage de logiciel émerge au début des années 80, alors que de nombreux hackers habiles de leurs mains cherchent à passer outre les protections des logiciels commerciaux sortant sur le marché. À côté de programmes comme Adobe Photoshop ou Microsoft Office, des jeux emblématiques de l’époque ont été la cible des pirates, comme Tomb Raider, Warcraft, Tony Hawk ou encore Fifa. Pour apposer leurs signatures sur leur création, les hackers ont ainsi développé de véritables introductions (les fameuses cracktos, pour « crack intros ») qui servaient avant tout de démonstration technique à tous les égards, au niveau visuel, mais aussi musical. 

On assiste alors à l’émergence de la demoscene, une communauté grandissante de développeurs et artistes qui s’attèlent à la création de démos : des programmes audiovisuels toujours plus impressionnants malgré les contraintes techniques de l’époque.

La relative simplicité des musiques de cracks et keygens vient des limitations notables des démos de l’époque : il fallait faire tenir toute une présentation visuelle et sonore dans une disquette ne pesant pas plus de 800 kbit.

Le contenu animé prenant déjà énormément de place, les artistes ont dû redoubler d’ingéniosité pour la musique. Les compositeurs utilisaient des samples très simples par nature, mais qui superposés formaient de véritables morceaux de 3 minutes. Ces morceaux étaient pour la plupart composés à l’aide de music trackers, programme dans lesquels chaque note, paramètre et effet devait être entré à l’aide de combinaisons de chiffres et de lettres. Ces programmes ont été pensés avant tout par et pour des développeurs de musique 8-Bit, ce qui explique leur fonctionnement un brin archaïque par rapport aux logiciels et séquenceurs contemporains

Cette pratique a influencé de nombreux genres musicaux et mouvements artistiques, de la demoscene, cette communauté de développeurs et créateurs à la chiptune.

Commodore 64 demoscene (Danemark, 1988).

L’objectif ici reste celui de l’appropriation et de la pure démonstration : proposer un son catchy et permettant d’identifier les différents groupes de hackers, qui se livraient une guerre acharnée (et encore aujourd’hui). Si la pratique s’est un peu perdue ces dernières années, elle a marqué son empreinte sur l’énorme et toujours vivace sous-culture du "warez".

L’histoire de la keygen music est étroitement liée à celle de la chiptune, mouvement musical très inspiré par les sonorités 8-Bit des années 80, que l’on retrouve notamment dans les jeux Super Mario de l’époque.
Le site Keygenmusic.net s’efforce d’archiver d’innombrables morceaux de l’époque dans leur format d’origine à lire sur des logiciels comme VLC ou encore Winamp. On vous propose de faire un petit retour en arrière avec une sélection keygen music par Like Fire, une série de bangers à base de bip et boop qui n’ont rien à envier à la chiptune d’avant et d’aujourd’hui.